La Présence à soi
Faire l’expérience de la présence à soi ne consiste pas simplement à être attentif aux sensations, aux émotions et aux pensées qui, à chaque instant, s’offrent à la conscience discriminante. Ceux qui ont déjà pratiqué la méditation le savent : nos sensations, nos émotions et nos pensées ne sont que des phénomènes passagers. Nous avons à peine le temps d’en prendre conscience que, déjà, ils disparaissent pour laisser la place à d’autres. L’enjeu est de ne pas nous laisser emporter par ce flux incessant et de simplement l’observer avec détachement, un instant après l’autre. Nous avons alors la possibilité de percevoir le silence et la paix qui existent de façon immuable, à l’arrière-fond – au-delà de la confusion de nos sensations, des perturbations de nos émotions et de l’agitation de nos pensées. C’est seulement à ce moment-là que nous sommes vraiment présent à tout ce qui se passe en nous.
L’expérience de la présence à soi est inhabituelle car nous sommes rarement à la fois assez attentif et assez paisible pour pouvoir observer de manière détachée les phénomènes transitoires qui s’offrent à notre conscience discriminante et, en même temps, écouter le silence qui règne dans les profondeurs de notre être. Dès que nous y parvenons, nous découvrons que nous ne sommes pas fondamentalement nos sensations, nos émotions et nos pensées puisque celles-ci ne sont que des phénomènes passagers. Seuls le silence et le calme demeurent en permanence au fond de nous. Faire l’expérience de cette paix intérieure nous amène à reconsidérer la nature de notre Essence. Nous ne nous identifions plus au moi névrotique (l’ensemble des mécanismes d’adaptation et de défense qui constitue notre personnalité – notre ego apeuré et conditionné). Nous ne nous identifions plus non plus à la conscience discriminante (l’observateur ou le méditant en nous) qui porte son attention sur les différents constituants (sensations, émotions et pensées) du moi. Car, dans cette qualité de présence paisible et silencieuse, nous nous rendons compte que, au-delà des perceptions et des interprétations mentales, nous sommes pure conscience – le Soi apaisé et non personnel qui ne dit pas « je suis ceci ou cela » mais tout simplement « Je suis » (« Je suis indépendamment de ceci ou de cela »).
Ainsi, la présence à soi est, en fait, la présence au Soi ; nous pourrions même dire la présence du Soi. Or, le Soi est, nous l’avons vu, acceptation inconditionnelle de ce qui est, silence et calme, confiance absolue, vide rempli de tous les possibles, expérience de non-dualité, sentiment d’être relié à tout ce qui est, oubli des préoccupations personnelles au profit des intérêts universels. Sa sagesse génère des comportements apaisés, respectueux de l’équilibre et de l’harmonie indispensables pour que la vie puisse s’épanouir pleinement en tout ce qui existe ; elle recommande d’aller à l’essentiel, dans la simplicité et dans l’authenticité. La joie qui se manifeste alors n’a rien à voir avec le contentement qui naît de la réduction des frustrations du moi ; elle est sans objet, elle ne dépend pas des conditions extérieures mais plutôt de la connexion au noyau profond de l’être – le Soi qui est source de la pleine vitalité et de la créativité (le mot joie vient du latin gaudia dont la racine indo-européenne est –yug qui signifie lier, relier, réunir, faire l’unité). Il s’agit de la joie d’être vivant, de la joie de vivre, tout simplement. Le Soi ne perd pas d’énergie à refouler des souffrances, mettre en place des défenses et créer une personnalité destinée à survivre ; au contraire, il accueille tout ce qui est, sans dépenser d’énergie, et il se laisse être dans la détente en utilisant l’énergie disponible pour entretenir l’élan de vie (la flamme de vie) ; il est la vie qui engendre et nourrit la vie ; il autoproduit son énergie, sa vitalité et son enthousiasme (du grec en théos : dieu à l’intérieur, enthousiasmos : transport divin, enthousiazein : être inspiré par la divinité).
Parler de la présence à soi en ces termes peut paraître mystique ou religieux. L’expérience du Soi n’est pas habituelle, elle n’est pas ordinaire, elle est extra-ordinaire. Elle dépasse ce que nous qualifions d’« humain » (ce qui de l’ordre du moi) ; nous lui attribuons donc une dimension supérieure ou plus profonde qui nous paraît de l’ordre du « divin » (au-delà du moi). Voilà pourquoi, dans le langage de certains, le Soi correspond à la part divine – la source de vie – qui est en chaque individu. Cependant, il n’est pas nécessaire de faire appel à l’existence d’un dieu personnel et créateur pour expliquer comment l’expérience de la pure conscience procure une sensation de vie intense et joyeuse. L’apparition de cette sensation peut s’expliquer en des termes neurophysiologiques. En effet, chaque fois que le mental s’apaise (chaque fois que les sensations, les émotions et les pensées diminuent en fréquence et en intensité), l’individu éprouve un calme intérieur associé à une profonde détente corporelle dûe à l’activation du système nerveux parasympathique. Celle-ci déclenche les mécanismes de récupération, de réparation et de régénération de l’organisme, gages de la préservation d’une bonne santé. En même temps, le cortex préfrontal gauche du cerveau s’active de manière préférentielle et facilite l’émergence d’émotions agréables (joie et enthousiasme) qui génèrent le sentiment d’une grande vitalité. En revanche, dès que le calme intérieur est masqué par l’hyperactivité du mental (nous disons bien « masqué » et pas « troublé » car, à l’instar du bleu du ciel et de la lumière du soleil qui demeurent inchangés derrière les nuages, le calme intérieur reste intact et toujours accessible malgré les perturbations qui empêchent de le percevoir), la conscience discriminante est saturée d’informations (sensations confuses, émotions désagréables, pensées agitées) au point de générer un sentiment de séparation. Le sentiment d’être un moi différent des autres, accompagné du sentiment d’être déconnecté de la partie profonde de soi, crée une impression d’insécurité. Dans ce cas, c’est le cortex préfrontal droit du cerveau qui s’active préférentiellement (il est à noter que l’hémisphère cérébral droit est particulièrement influencé par les expériences précoces de la vie, les souffrances émotionnelles et les mécanismes instinctifs de défense). L’émergence d’émotions désagréables (peur, anxiété, colère) s’en trouve facilitée. En même temps, une réaction de stress est enclenchée du fait de la stimulation du système nerveux sympathique. Celle-ci prépare l’individu à défendre les intérêts de sa personne (son moi). Cependant, si elle perdure trop longtemps, elle finit par entraîner une série de perturbations hormonales et une diminution des défenses immunitaires qui fragilisent l’organisme. Il paraît donc important de pouvoir régulièrement contrebalancer cette fragilisation due à une trop forte identification au moi, en redevenant présent au Soi paisible et silencieux (ce qui revient à faire l’expérience de la pure conscience).
Ainsi, la tension physique et psychique renseigne sur l’état de déconnexion par rapport au Soi ; alors que la détente physique et psychique indique, au contraire, une bonne connexion avec ce noyau de vitalité. Il est donc utile que chaque individu puisse développer la capacité d’attention de sa conscience discriminante pour mieux percevoir les symptômes de la tension physique (raideurs et douleurs) et de la tension psychique (émotions désagréables, irritabilité, fatigue). Ces symptômes traduisent la perte de fluidité, la perte d’aisance – le dis-ease (dit-on en anglais) – qui peut mener à la maladie. Dès que l’on constate leur apparition, il est important de respirer profondément afin de rétablir la balance entre l’activité des systèmes nerveux sympathique et parasympathique. Automatiquement, cela génère la détente et l’apaisement nécessaires pour briser le cercle vicieux qui s’instaure dès lors que le stress dû à l’activation du système nerveux sympathique est non seulement la conséquence mais aussi la cause de la déconnexion par rapport au noyau de vitalité (aussi appelé la « source de vitalité »). Le rôle primordial de la respiration dans la reconnexion à cette sensation de pleine vie explique sans doute pourquoi le souffle – spiritus chez les Romains, pneuma chez les Grecs, ankh chez les Égyptiens, prana chez les Indiens, qi chez les Chinois – est une notion essentielle dans de nombreuses spiritualités. Quant aux mots « noyau » et « source », ils traduisent l’expérience rapportée par ceux qui sentent la connexion au Soi – le sentiment d’être au plus profond le simple « Je suis », apaisé et joyeux, qui est à l’origine de tout ce qui est expérimenté et conscientisé.
Personne ne peut survivre indéfiniment dans l’état de tension et de stress provoqué par l’identification au moi. Il est absolument nécessaire de pouvoir prendre du recul pour se désidentifier de l’ego, apaiser le mental et générer des émotions agréables. Comme l’a bien montré Barbara Fredrickson dans sa broaden-and-build theory of positive emotions (la théorie de l’élargissement et de la construction grâce aux émotions positives), les émotions désagréables (souvent qualifiées de négatives) qui surviennent lorsque l’on est trop identifié à l’ego, sont des émotions utiles pour survivre à court terme car elles sont accompagnées de pensées étroites, focalisées sur les détails, répondant à des schémas stéréotypés et conditionnés qui permettent de réagir dans l’immédiat pour éviter un danger. Tandis que les émotions agréables (souvent qualifiées de positives) qui apparaissent lorsque l’on est suffisamment désidentifié de l’ego, sont des émotions absolument nécessaire pour vivre sur le long terme car elles favorisent une vision d’ensemble, la flexibilité et la créativité de la pensée, l’élaboration de raisonnements inhabituels, la résolution de problèmes difficiles, ainsi que la mise en place de réponses comportementales apaisées, réfléchies et constructives. En outre, ces émotions agréables rendent celui qui les éprouvent plus ouvert et plus sympathique ; elles favorisent donc la création de relations amicales qui peuvent se révéler très précieuses sur le long terme.
Celui qui est dans l’état paisible et joyeux de la pure conscience possède un grand charisme. Il n’a pas besoin de parler ni d’agir, sa seule présence apporte de la paix et du réconfort. Les autres le perçoivent comme un être lumineux et sage. Ses attitudes, ses paroles et ses actions paraissent justes, en lien avec l’essentiel, guidées par la générosité et l’altruisme. Il dégage une grande fluidité. Ses yeux « écoutent » tout ce qui est sans réagir, ils s’ouvrent sur un vaste espace intérieur ; on a le sentiment d’y plonger comme dans un océan. Son regard paisible et bienveillant exprime la joie d’être vivant, simplement présent. N’étant pas identifié à l’ego, il ne revendique nullement la lumière et la sagesse que les autres lui attribuent ; il ne dit jamais « ma lumière » ou « ma sagesse » mais bien « la lumière » et « la sagesse ». Et lorsque il témoigne de son expérience durant les moments de pure conscience, il dit avoir l’impression de s’abandonner à ce qui est, de s’oublier complètement, de ne pas réfléchir, de se laisser « traverser » par des mots justes qui viennent d’ailleurs, ou de se laisser « inspirer » par une voix qui surgit des profondeurs de l’être. Certains font référence à une divinité ou à un guide spirituel désincarné pour expliquer l’origine de leur inspiration et de leurs intuitions. D’autres, moins influencés par des représentations dualistes, préfèrent ne pas apporter d’explication et se contentent d’affirmer qu’ils se sentent reliés aux principes fondamentaux de la vie – des principes qui sont inscrits au plus profond de chacun et auxquels on peut accéder lorsque l’on a suffisamment d’espace et de silence à l’intérieur de soi pour les laisser remonter à la surface et les écouter sans les juger ou les analyser. Pour eux, le Soi n’est pas assimilable à un divinité extérieure, ni même à un « bon génie » intérieur (l’eudaimon des anciens Grecs) ; il est non personnel, on ne peut donc le personnifier. Dans leur expérience, la présence au Soi – présence du Soi – est pure présence, elle est la Présence. « La Présence n’est entière qu’en votre propre absence », disait Jean Klein. Cette Présence là est la porte de l’Éveil.
Dans de nombreuses traditions spirituelles, l’Éveil est décrit comme une « illumination » – une « apocalypse » (de apokalupsis en grec : la levée du voile, la révélation), une « seconde naissance », une « vision direct du réel » – au cours de laquelle le mental se tait et la pure conscience constate l’illusion dans laquelle l’individu vivait jusqu’alors en croyant être un moi séparé. Il s’en suit un état de grâce qui dure plus ou moins longtemps, caractérisé par un « sentiment océanique », un profond calme intérieur, la vision claire de l’impermance et de la vacuité de toute chose, le sentiment d’être uni à la totalité et même de devenir cette unité. Après avoir connu une telle extase, l’individu constate généralement que les conditionnements de sa personnalité se manifestent encore mais il ne s’y identifie plus ; il les observe et il a en lui suffisamment d’espace pour ne plus simplement réagir mais plutôt agir en conscience afin de créer l’équilibre et l’harmonie qui permettent de maintenir la paix intérieure. Ainsi, l’ego n’est pas détruit, il est simplement englobé dans quelque chose de plus vaste que lui, à savoir le Soi – la pure conscience éveillée qui est aussi acceptation inconditionnelle de ce qui est. Le mental continue à fonctionner (l’en empêcher est impossible), mais il ne commande plus ; il sert. Les aptitudes, les capacités et les qualités du moi sont mises au service du Soi. Cela n’empêche pas ceux qui ont connu un tel éveil spirituel d’avoir à traverser des moments parfois très sombres, des « nuits obscures de l’âme » comme les appelaient Jean de la Croix. Celles-ci surviennent sans que l’on puisse les prévoir ni les empêcher. Tout ce qui dans le passé procurait du plaisir perd son sens, l’individu peut avoir des pulsions suicidaires, il frôle parfois la psychose, il a l’impression de traverser un désert dans lequel il est confronté à ses monstres intérieurs, il rencontre l’ombre – sa propre ombre – qui cache la lumière. C’est alors le temps du lâcher prise, de l’acceptation inconditionnelle de ce que l’on découvre en soi, de la bienveillance pour soi, de l’amour et de la compassion, de l’humilité, du renoncement, du deuil (de l’image du moi idéalisé) et de la purification. Le chemin spirituel est rarement une partie de plaisir mais la libération à laquelle il conduit est source de la plus grande joie.
Pour certains l’Éveil se manifeste d’emblée de façon définitive. Ils connaissent alors la « réalisation du Soi » que les hindouistes appellent samadhi (sam : complet, adhi : repositionnement ; le repositionnement complet de l’être, l’accomplissement qui survient lorsque l’âtman – le dieu intérieur – fusionne avec le brahman – l’Absolu – et donne accès à moksha : la libération du cycle des renaissances). Les bouddhistes appellent également la réalisation du Soi samadhi (ou satori dans le Zen) : l’établissement dans l’Éveil qui donne accès à bodhi – la Connaissance parfaite qui mène au nirvana qui est la libération du samsara, (le cycle des conditionnements et de la souffrance). Les chrétiens, quant à eux, décrivent parfois cette expérience comme « la Conversion » ou la « Résurrection ». Cependant, qu’il soit soudain, complet et définitif ou progressif et entrecoupé de « nuits obscures de l’âme », le véritable Éveil se produit toujours de façon inattendue et spontanée, sans qu’il ait été recherché. Plus on l’espère, moins il peut se manifester. Car l’Éveil ne peut être vécu dans l’attente, il n’est possible que dans la pure conscience du présent. C’est l’ego qui attend et espère. Bien souvent il veut se valoriser en s’attribuant le mérite d’être éveillé ; il perpétue alors un sentiment de séparation qui empêche la dissolution du moi dans le Soi.
Par ailleurs, le véritable Éveil dépend toujours de ce que les soufis appellent « l’œil du cœur » (« les réalités cachées derrière les apparences ne peuvent être perçues que par l’œil du cœur », dit-on dans l’islam) – l’amour inconditionnel (non soumis aux critères du mental conditionné). Les bouddhistes insistent, eux aussi, sur la place central du cœur lorsqu’ils désignent l’engagement sur la voie de l’Éveil – la bouddhéité – par le mot bodhicitta : l’esprit d’Éveil ; car bodhi signifie l’Éveil et citta le « cœur-esprit ». En science nous disposons d’études qui montrent que, dans des situations de stress psychologique, des personnes entraînées à la méditation ont une activation préférentielle de leur cortex préfrontal gauche, au lieu de l’activation du cortex préfrontal droit qui se produit habituellement dans ce genre de circonstances. Elle réagissent alors de façon plus « éveillée » : à la place des émotions désagréables, des pensées négatives et des comportements de défenses automatiques qui surviennent généralement dans les situations de stress, elles ont des émotions agréables, des pensées positives ainsi que des réactions paisibles et constructives. Le cortex préfrontal gauche paraît donc jouer un rôle important dans la survenue de la Présence et de l’Éveil spirituel (alors que le droit apparaît davantage impliqué dans la gestion automatique des situations rappelant les souffrances émotionnelles du passé, face auxquelles il déclenche des réactions stéroptypées et répétitives). Ce cortex préfrontal gauche favorise non seulement l’émergence d’émotions agréables mais aussi ainsi la stimulation du système nerveux parasympathique dont le nerf vague régule l’activité du cœur. Les neurosciences expliquent donc à la leur façon pourquoi ceux qui méditent et développent une plus grande présence au Soi attribuent une place centrale au lien entre le mental apaisé et le cœur (le concept du « cœur-esprit » – citta – des bouddhistes illustre parfaitement l’importance de ce lien).
Développer une présence apaisée, attentive et silencieux, n’est pas facile dans nos sociétés bruyantes et pressées où tout est organisé pour que les individus vivent à la superficie d’eux-mêmes. Nos sociétés sont très névrotiques. On y est terrifié par la perspective de la mort. On y valorise la pensée au détriment de l’expérience. On y encourage la performance et la possession (qui permettent de soutenir un système économique basé sur la production et la consommation de biens matériels) quitte à ne pas respecter les principes qui fondent la vie, la vitalité et la bonne santé. On y admire l’artifice, on y est fasciné par les apparences. On y récompense l’individualisme et l’égoisme ; on n’y pense qu’en terme d’hédonisme (recherche du plaisir pour le plaisir, un plaisir qui se veut ataraxie – absence de trouble – et apathie – absence de passion, une véritable anesthésie) ; on y dépense sans compter pour accroître le confort et la sécurité (quitte à se priver de belles opportunités d’apprendre, de grandir et d’exercer sa liberté de choix) et, lorsque la souffrance se manifeste, on préfère la supprimer à coup de médicaments (antidouleurs et antidépresseurs) plutôt que d’essayer de comprendre ses causes profondes pour y remédier ; on invente toutes sortes de divertissements qui empêchent d’accéder au silence intérieur qui, au-delà du mental, s’ouvre sur la pure conscience et permet de connaître l’Éveil ; on reste donc dans l’ignorance des véritables causes de la souffrance et on connaît l’impuissance de les supprimer – une impuissance qui se transforme souvent en résignation et, delà, en dépression. Conscientes de la nécessité de pouvoir se poser et se recentrer dans le silence intérieur, certaines cultures préconisent de prendre le temps de se recueillir ou de prier, parfois plusieurs fois par jour (pensons, par exemple, au cinq temps de prière recommandés par l’islam). C’est heureux, à condition bien sûr que ces temps de recueillement et de prière soit réellement l’occasion d’une véritable présence à soi et d’une authentique expérience de pure conscience.
Valoriser une telle démarche dans nos sociétés névrotiques modifierait profondément la civilisation dans laquelle nous vivons. Au lieu de simplement réagir pour survivre en créant un monde agité, ultrasophistiqué et conflictuel (un monde rassurant pour notre ego apeuré mais pas réellement épanouissant pour l’Essence confiante et vivante de notre être), nous pourrions agir de façon plus apaisée, en recherchant la simplicité, dans l’intérêt de la collectivité et dans le respect des besoins essentiels qui permettent à la vie de se manifester pleinement. L’impact d’un tel changement sur la prévention d’un grand nombre de pathologies serait important (en agissant notamment sur la pollution de l’environnement et sur le mode de vie stressé des individus). Cela aiderait aussi à la guérison de beaucoup de malades (en les aidant à économiser leur énergie et à recontacter la source de vitalité en eux). Et, cela permettrait d’aborder plus sereinement l’idée de la mort (en allant au bout du processus d’individuation qui permet de se désidentifier de l’ego et de connaître le sentiment d’accomplissement de l’être ; en apprenant dès le plus jeune âge à dissoudre le moi dans la pure conscience du Soi ; en faisant l’expérience du silence et de la paix qui existent au-delà de la pensée ; en apprenant à lâcher prise pour découvrir l’éternité du moment présent ; en ayant le sentiment d’avoir touché à l’essentiel ; et en comprenant combien le fait de mourir donne une valeur à la vie).
A l’EDLPJ, nous proposons un apprentissage basé sur plusieurs outils :
- Le développement de la conscience des phénomènes corporels
- L’instauration du calme mental et de la détente corporelle
- La désidentification par rapport au moi
- Le développement de l’acceptation inconditionnelle de tout ce qui est
- L’écoute du silence intérieur
- Des exercices adaptés à la vie quotidienne